Conférence M. Alain LETOURNEAU
Depuis plusieurs décennies, d’importantes réflexions sont développées dans plusieurs secteurs plus ou moins concomitants et distincts : l’éthique environnementale, l’éthique écologique ou l’écologie politique. Chacune de ces appellations comprend de multiples orientations, et traite une pluralité de questions; par exemple l’éthique du climat dans le secteur éthique environnemental, ou la reprise en écologie politique de la théorie des communs (Ostrom, 1990) dans des perspectives variables qui méritent plus d’attention (Dardot et Laval, 2014; Audier, 2020). Je crois intéressant de reprendre la « question environnementale » d’un point de vue qui est celui de l’expérience (James, 2007), mais celle-ci est affaire de relations riches et variées, alors il faut préciser. Depuis bien avant ce qu’on appelle l’histoire qu’on documente surtout par l’écriture, l’homo sapiens a puisé largement, mais s’est aussi battu contre l’environnement, sans oublier la fuite (prédateurs; alimentation; refuges contre les intempéries). Plusieurs auteurs ont cru renforcer l’unité de notre espèce avec l’environnement bio-géo-physique, notamment l’écologie profonde d’Arne Naess qui tente de modifier au plan ontologique notre rapport à la nature (Naess, Écologie, communauté et style de vie, 1989). De son côté, le pragmatisme environnemental (depuis Light et Katz, 1996, mais aussi Norton, 2005) permet de saisir que l’Idée de « se centrer » sur la nature ou les vivants pour dépasser l’anthropocentrisme a ses limites, puisque les humains font partie de l’équation, comme principal facteur perturbateur, considéré d’un point de vue sociétal. On arrive d’ailleurs au même résultat en repartant d’une perspective disons post-nietzschéenne (Sloterdijk, Sphères I-III, 1998-2004). Dans les feux intenses devenus fréquents de nos jours sur tous les continents, dans les inondations par submersion ou en raison des pluies intenses, un visage plus problématique de l’environnement se fait de nouveau percevoir, impliquant pertes de vies humaines, déplacements de populations et coûts considérables. Reconnecter l’humanité aux effets environnementaux brutaux dont on vient de donner quelques exemples peut-il fournir le choc dont ont besoin les décideurs préoccupés d’autre chose ? Ce sont ces différentes questions qu’il s’agira d’explorer.
Amphi Asselain - Campus Pessac